En politique, il faut savoir ne pas insulter l’avenir. Et quand
on ne sait pas trop de quoi l’avenir sera fait, le mieux est encore de n’insulter
personne. C’est vrai, on ne va quand même pas risquer de louper un bon poste
(au sein d’un parti, au sein d’un gouvernement, ou même une belle investiture)
pour de bêtes questions de fond ! Qu’il est fou de perdre la vie (même la
vie politique) pour des idées…
Chez certains, cette prudence qui consiste à ne rien choisir
est érigée en art, en véritable mode de vie. Prenez monsieur et madame Ni-ni, par
exemple : j’ai nommé Nathalie Kosciusko-Morizet et Bruno Le Maire.
Le duel Copé/Fillon ? Ils avaient refusé de prendre
parti. Bon, à l’époque, on pouvait se dire que, ayant l’un et l’autre été
empêchés de se présenter, ils tiraient simplement la gueule et refusaient d’apporter
leur soutien à un des vieux barons (au PS, on parlerait d’éléphants) qui
avaient si bien verrouillé l’élection ; ça aurait été de bonne guerre.
Mais aujourd’hui, rebelote : le mariage homosexuel ?
Oh, j’sais pas… P’têt ben qu’oui, p’têt ben qu’non… J’peux pas dire… Il est
vrai que Bruno Le Maire est député de l’Eure, et que l’Eure, c’est en Normandie.
Mais quand même, là, on commence à avoir des soupçons : et si cette
incapacité chronique de choisir ne relevait pas plutôt de la grosse lâcheté et
de l’opportunisme à peine déguisé ?
Évidemment, les intéressés s’en défendent : ainsi,
Nathalie Kosciusko-Morizet a affirmé qu’elle s’abstiendrait lors du prochain
vote sur le projet gouvernemental de « mariage pour tous », mais elle
précise bien qu’il « ne s’agit pas d’un refus de choisir, mais d’une
abstention militante et engagée. »
Bien sûr bien sûr… Dites-moi, ça n’aurait pas plutôt un
rapport avec la prochaine candidature de madame à l’investiture de l’UMP pour
la mairie de Paris ? Comme avait dit un proche de Roselyne Bachelot, se
présenter à la mairie de Paris en n’étant pas « gay-friendly »
reviendrait à faire campagne en Israël revêtu d’un uniforme de SS… Mais voilà,
comme NKM n’est quand même pas si courageuse que ça, elle préfère ne pas
rejoindre les rangs (enfin, les rangs, c’est beaucoup dire : ils sont
deux) des députés de l’UMP qui voteront en faveur du texte (Riester et Apparu,
en voilà au moins deux qui ne sont pas des couards).
D’ailleurs, elle était déjà comme ça comme ministre de l’environnement
sous Sarkozy : amie à la fois avec Total et avec la nature, avec la
croissance et avec la préservation de l’environnement, avec le nucléaire et avec
les économies d’énergie.
Bref. Évidemment, j’ai conscience, en écrivant ce billet, de
ne pas franchement lever un lièvre. Mais il me semble que ça méritait d’être souligné :
le courage, la force de caractère, l’imagination, la capacité à s’opposer, y
compris à son propre camp, sont décidément choses bien rares en politique. On
accuse Hollande de mollesse et d’indécision ; à mon avis, le problème, ce
n’est pas spécialement Hollande. C’est plutôt qu’au milieu de ses collègues,
tous partis confondus, il est… un peu trop normal.
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