Sautez sur l’occasion : pour une fois, l’Église
catholique vous demande votre avis sur quelque chose. Un questionnaire circule
pour préparer le Synode d’octobre prochain sur la famille. Évidemment, comme
c’est une première, c’est un peu brouillon : le Vatican a envoyé ça aux
conférences épiscopales partout dans le monde, mais apparemment sans consignes
claires sur ce qu’il fallait en faire ; du coup, certaines ont relayé
auprès des paroisses ou des diocèses, avec consigne de faire remonter l’avis
des laïcs vers la hiérarchie ; alors que d’autres (en France par exemple,
ahem) n’ont pas fait ce travail de diffusion, à l’exception de quelques
diocèses (il me semble que quelque part dans le Nord, ils ont organisé un
Synode diocésain).
Mais bon, ne nous laissons pas abattre : la magie
d’Internet nous offre une chance de vaincre les pesanteurs épiscopales et
l’inertie hiérarchique ! Je vous propose donc ma réponse à ce
questionnaire, réponse pour l’instant toute personnelle, mais que je compte
soumettre à la prochaine Assemblée locale de Tol Ardor pour en faire une
réponse (un peu plus) collective.
NB : Il est
évident que j’invite tous mes amis, en particulier cathos, à remplir ce
questionnaire, à le diffuser autour d’eux, et surtout à le renvoyer aux
« autorités compétentes », en l’occurrence à votre évêque. Le
questionnaire d’origine est assez complexe (organisé en 39 points parfois très
techniques). Vous pouvez trouver l’original ici, si vous êtes intéressé ;
de mon côté, je n’ai repris que les neuf points de base, et il est évident que
vous pouvez faire de même. Il faut être rapide cependant, la consultation des
laïcs prend fin à la fin du mois de janvier. Enfin, la CCBF est intéressée par
vos réponses : vous pouvez lui renvoyer les questionnaires complétés à synodefamille@baptises.fr.
1. Sur la diffusion
des Saintes Écritures et du Magistère de l’Église concernant la famille.
Commençons par une évidence : le Magistère de l’Église
sur la famille et la sexualité n’est pas respecté. Il ne l’est pas par les non
catholiques, bien sûr, mais il ne l’est pas non plus par les catholiques, même pratiquants.
Ces derniers agissent à peu près comme si de rien n’était, se masturbent, ont
des relations homosexuelles quand ils sont homosexuels, utilisent la
contraception, avortent même parfois. Ils le font avec plus ou moins de bonne
conscience, plus ou moins de culpabilité et de souffrance, mais dans leur
immense majorité, ils le font.
Est-ce parce que l’enseignement de l’Église ne leur serait
pas connu ? De toute évidence, il l’est peu, ou plutôt il est bien connu dans
ses très grandes lignes, pas du tout dans les détails. Et c’est vrai y compris
des catholiques, et même des pratiquants. Rarissimes en effet, même parmi les déjà
rares qui vont à la messe tous les dimanches, sont ceux qui ont lu, ou même qui
connaissent l’existence de Gaudium et
spes ou de Familiaris consortio.
L’immense majorité des gens, catholiques ou pas, ne
retiennent donc du Magistère qu’une liste de condamnations toutes plus
exotiques les unes que les autres : refus de la sexualité hors mariage,
refus de la masturbation, refus de la contraception, refus des actes sexuels
qui ne sont pas « ouverts sur la vie », refus de l’homosexualité,
refus de l’avortement quels qu’en soit la date et le motif.
Bien sûr, ils connaissent mal ou pas du tout les
argumentaires développés par l’Église pour justifier ces positions. Mais est-ce
vraiment bien le problème ? Moi qui les connais, je suis bien placé pour
dire qu’ils ne sont pas convaincants du tout. J’ai longuement discuté de cela
avec des prêtres ou des intellectuels catholiques, et ils n’ont jamais réussi à
me convaincre sur aucun de ces points ; j’ai toujours estimé que la
discussion révélait au contraire les impasses logiques, théologiques et
intellectuelles dans lesquelles ils s’enferraient.
J’affirme donc que si le Magistère de l’Église sur les questions
de famille et de sexualité n’est pas respecté, ce n’est pas d’abord parce qu’il
n’est pas connu, mais avant tout parce qu’il est, au fond, indéfendable en
raison.
2. Sur le mariage
selon la loi naturelle.
Là encore, il y a un malentendu. Il est vrai que la notion
de « loi naturelle » est assez obscure pour nombre de catholiques, même
pratiquants – ne parlons pas des non croyants. Mais ce n’est pas le problème.
La frontière n’est pas tant entre ceux qui croient qu’il y a une loi naturelle
et ceux qui ne le croient pas. D’ailleurs, ces derniers sont assez rares :
l’immense majorité de la population, quelles que soient ses croyances, accepte
intuitivement, instinctivement, l’idée de loi naturelle, même s’ils ne l’appellent
pas ainsi. C’est au nom de ce principe supérieur que, par exemple, aucune
société développée n’accepterait de légaliser l’infanticide ou les actes de
cruauté envers les animaux. Ils n’appellent peut-être pas cela « loi
naturelle » ou « volonté de Dieu » (deux expressions absolument
synonymes), mais ils croient tout de même, à de rares exceptions près, à des principes
moraux transcendants et absolus.
La véritable frontière divise donc plutôt différentes visions
de ce qu’est la loi naturelle. Ainsi, de mon point de vue de catholique pratiquant,
j’affirme que le mariage ou la possibilité d’adopter des enfants pour les
couples homosexuels est parfaitement conforme à la loi naturelle. Ce n’est pas
le lieu, dans ce questionnaire, de développer les arguments en faveur de cette
position : je l’ai longuement fait ailleurs. Mais il est important de
reconnaître qu’accepter le principe de « loi naturelle » est une
chose ; croire que l’Église en a une vision correcte en est une autre,
bien différente.
De ma position découle naturellement l’idée que l’Église
devrait, pour se rapprocher de la volonté de Dieu, réformer ses positions
morales et adapter ses rites et ses pratiques en conséquence.
3. La pastorale de la
famille dans le contexte de l’évangélisation.
Les familles me semblent le lieu essentiel de transmission
de la foi. Mais elles rencontrent un obstacle majeur : même une culture
familiale forte ne fait plus le poids face au refus de l’enseignement de l’Église
dans la majorité de la société. Un enfant a beau avoir été formé dans la foi la
plus solide, dans la prière et les rites, il aura bien du mal, devenu
adolescent puis adulte, à résoudre la contradiction entre ce qu’on lui aura
appris et l’évidence du monde dans lequel il vit ; et ce d’autant plus que
les points précédents ont montré qu’il n’aura pas les outils argumentatifs qui
lui permettrait de le faire en faveur du Magistère.
En conséquence, il risque fort de s’éloigner de l’Église,
plus ou moins violemment, puis de se couper d’elle. Pour éviter cela, il me
semble donc que les familles doivent être le premier lieu de résistance à un
enseignement non seulement faux, mais extrêmement dangereux pour l’avenir de l’Église
elle-même, car il contribue dramatiquement à la vider de ses forces vives.
4. Sur la pastorale
pour affronter certaines situations matrimoniales difficiles.
Sur ce point particulier, on ne peut que répéter ce qui a
été dit au 1. : oui, les catholiques, même pratiquants, vivent en couple
et ont des relations sexuelles avant le mariage ; oui, certains vivent « en
union libre, sans reconnaissance aucune, ni civile ni religieuse » ;
oui, certains se séparent, et parfois se remarient.
Coller, comme on nous demande de le faire, des pourcentages
à ces réalités indéniables est évidemment bien difficile. Sauf sur un point :
le taux de catholiques pratiquants qui ont des relations sexuelles avant le
mariage est très probablement supérieur à 90%.
Comment les baptisés vivent-ils ces « situations
particulières » ? Cela dépend de beaucoup de facteurs. On ne vit pas
de la même manière l’interdiction de la communion après un remariage ou le fait
d’avoir, à 25 ans, des relations sexuelles sans être marié. De même, tous n’ont
pas la même histoire, les mêmes principes, les mêmes idées, le même ressenti.
Certains sont indifférents. D’autres souffrent, parfois beaucoup.
D’après mon expérience, l’enseignement de l’Église est
surtout source de souffrance, chez les pratiquants, pour les homosexuels et les
divorcés remariés. Les uns comme les autres vivent le discours et les pratiques
de l’Église comme une véritable exclusion, voire une manifestation de haine, et
comme un rejet de ce qu’ils sont, de leur histoire ou d’une part de leur identité.
Que faire ? À partir du moment où la doctrine de l’Église
en la matière me semble absolument fausse, il est évident que je ne prône pas
la mise en place de « programmes pastoraux adaptés ». C’est au
contraire la doctrine même de l’Église qu’il s’agit de changer, en en tirant
toutes les conséquences : libre accès à la communion pour les divorcés
remariés, remariages religieux, mariages religieux pour les couples
homosexuels.
Petite parenthèse à propos des couples divorcés remariés :
une facilitation des annulations de mariage pourrait-elle représenter une
solution ? Assurément pas. Ce serait éminemment hypocrite. La plupart des
mariages qui échouent ont pourtant été, en toute objectivité, parfaitement
légaux du point de vue du droit canon. On ne gagnera rien à ménager la chèvre
et le chou, c’est-à-dire à vouloir sauver à la fois l’idée que la doctrine de l’Église
est juste, mais que les situations particulières des divorcés remariées sont
justes aussi. En outre, il y a quelque chose de malsain à vouloir effacer un
pan entier de l’histoire d’une personne, à lui dire : « en fait, vous
n’avez jamais été marié ». Si, une personne divorcée a été mariée, mais
son mariage a été un échec. Toute autre proposition est, au fond, un mensonge.
Et j’insiste : j’invite toute personne qui verrait des empêchements
théologiques à tout cela à venir m’en parler ; je suis prêt à un débat
public sur toutes ces questions.
5. Sur les unions de personnes
de même sexe.
La France a légalisé le mariage et l’adoption pour les
couples de même sexe. En tant que catholique pratiquant, je m’en réjouis sans
la moindre réserve. L’Église de France s’est très largement mobilisée contre ce
texte, et à mon sens elle, dans la manière dont elle l’a fait, s’est déshonorée
de la dernière manière.
Que des évêques s’expriment contre la proposition de loi, c’était
leur droit le plus absolu. Mais ils auraient dû entendre la profonde division
des catholiques, même pratiquants, sur ce sujet, et en tirer la conclusion qui
s’imposait : ils ne pouvaient parler qu’en leur nom propre, pas au nom de
l’Église tout entière, car « nous sommes aussi l’Église ». À tout le
moins, même quand ils choisissaient de répéter la position officielle de l’Église,
ils avaient le devoir de souligner que tous n’étaient pas d’accord avec elle.
Tout au contraire, ils ont choisi, délibérément, d’ignorer,
de mépriser, d’étouffer les voix discordantes qui cherchaient pourtant à se
faire entendre. Ils ont exigé un débat dans la société qu’ils ont refusé
catégoriquement de mener au sein de l’Église. Ainsi, ils ont accentué le
malaise dans l’Église de France. Aujourd’hui, ils n’ont toujours pas clairement
fait amende honorable, ce qui empêche la cicatrisation des blessures internes
et la réduction de la fracture qui nous divise. Ils contribuent donc à ce que
les adversaires d’hier ne se reparlent pas.
Aujourd’hui, il faut tourner la page de la lutte pour ou
contre la loi Taubira ; mais cela ne pourra se faire que si les catholiques
favorables à ce texte sont pleinement et publiquement reconnus a posteriori, à défaut de l’avoir été pendant
le débat.
6. Sur l’éducation
des enfants au sein de situations de mariages irréguliers.
Il est nécessaire aujourd’hui que l’Église se pose très
sérieusement la question de savoir si ce qu’elle a toujours considéré comme « irrégulier »
est vraiment contraire à la volonté divine. Un débat franc et ouvert qui
donnerait la parole à tout le monde permettrait, je pense, de répondre « non ».
Et on dissiperait ainsi nombre de faux problèmes.
7. Sur l’ouverture
des époux à la vie.
Encore une question qui ouvre la porte à moult malentendus.
Non, les catholiques, même pratiquants, et a
fortiori les non pratiquants ou les non chrétiens, ne connaissent en effet pas
bien Humanæ vitæ. Mais encore une
fois, c’est tant mieux, car cette encyclique est d’une telle viduité
intellectuelle, d’une telle fragilité théologique que, mieux connue, elle ne
pourrait guère que contribuer à éloigner davantage encore les chrétiens de l’Église.
Déjà, lors de sa publication en 1968, elle avait été un rude coup pour tous
ceux qui avaient nourri quelque espoir de voir Vatican II permettre une
évolution de la doctrine morale de l’Église. Dans le contexte actuel, elle
semblerait encore plus ridicule et inadaptée à la réalité de ce que nous
vivons.
Le questionnaire nous invite à réfléchir à « l’évaluation
morale des différentes méthodes de régulation des naissances ». Que l’Église
n’a-t-elle mené elle-même la réflexion à laquelle elle nous incite ! Elle
se serait peut-être rendu compte que rien, absolument rien, ne s’oppose
théologiquement aux méthodes habituelles de contraception (pilule
contraceptive, préservatif, stérilet). De même, elle aurait peut-être compris
que, dans un monde aux ressources finies, la croissance de la population humaine
doit elle aussi être limitée.
Faute d’une telle réflexion, l’Église vit dans une bulle, dans
une tour d’ivoire, loin, très loin de la réalité, du quotidien des fidèles.
Sans surprise, ces derniers se moquent éperdument de ses commandements en la
matière. Ainsi, puisque la question est évoquée, il est évident que jamais,
lors de mes confessions, je ne mentionne mon (notre) usage de la contraception.
Cela, en fait, ne me viendrait même pas à l’esprit, tant il est évident pour
moi que je ne commets en la matière pas le moindre petit péché.
Dieu merci, l’éducation civile est un peu plus
responsabilisante que l’éducation religieuse, sans quoi je ne sais pas où nous
en serions. En l’occurrence, la question qui clôt cette partie du
questionnaire, et qui invite à réfléchir au meilleur moyen de « favoriser
la croissance des naissances », me semble proprement criminelle dans le
contexte écologique actuel.
8. Sur le rapport
entre la famille et la personne.
Bien sûr que vie de famille et vie de la foi ont une
incidence l’une sur l’autre. Bien sûr que la famille est un lieu particulier d’épanouissement
et de rencontre avec le Christ.
Pour autant, est-elle forcément le meilleur lieu d’une telle
rencontre ? Il me semble qu’à l’heure actuelle, l’Église tend à considérer
qu’il n’y a que deux modèles de vie valables : le mariage et la famille d’une
part, le sacerdoce d’autre part. Or, entre les deux, il y a tous ces gens qui
ne se sont jamais mariés, qui n’ont jamais fondé de famille, mais qui n’ont pas
non plus entendu d’appel à devenir prêtres. J’ai souvent parlé avec eux de la
souffrance qu’ils ressentaient de voir que l’Église ne parlait jamais d’eux, ne
s’adressait jamais spécifiquement à eux. Elle parle aux prêtres, elle parle aux
familles, elle parle aux couples, elle parle aux jeunes (c’est-à-dire aux
futurs mariés et aux futurs prêtres), elle parle aux vieux (c’est-à-dire aux
ex-mariés et aux ex-prêtres) ; mais rien, rien de rien, pour les laïcs célibataires
et sans enfants. Il y a là un grand vide à combler d’urgence ; mais bien
sûr, pour combler ce vide, il faut corriger les erreurs théologiques sur
lesquelles il repose.
9. Autres défis et
propositions.
Le questionnaire n’aborde absolument pas le sujet de la
place et du rôle des femmes dans l’Église. Or, il me semble qu’il est lié à
ceux qui sont abordés ici. L’Église, là encore, commet une erreur théologique
fondamentale, encore une fois liée au sexe, au fond, en ne comprenant pas que
tout, absolument tout, ce qu’un homme peut faire, une femme peut aussi bien le
faire, ou en croyant que Dieu réserve certains rôles aux hommes et d’autres aux
femmes, ou en croyant qu’Il est plus masculin que féminin. Il y a là, à mon sens, un autre défi des plus urgents à
relever, et qu’on ne peut pas vraiment dissocier des précédents.
Enfin, l’Église devrait engager une réflexion sur les études de genre, pour se rendre compte qu’elles ne sont pas le travail de Satan que certains dépeignent.
Enfin, l’Église devrait engager une réflexion sur les études de genre, pour se rendre compte qu’elles ne sont pas le travail de Satan que certains dépeignent.
J'ai reçu le questionnaire, comme membre du conseil diocésain de pastorale (signe positif : on sollicite même des tordues comme moi pour faire partie de ce conseil :D ).
RépondreSupprimerje suis d'accord avec à peu près tout ce que vous dites ici - je nuancerais la réponse à la première question, globalement je pense que l'énorme majorité des cathos ignore l'enseignement de l'Eglise sur ces questions, et que c'est bien d'abord par ignorance qu'il n'est pas respecté. et je serais moins certaine que vous qu'il le resterait s'il était pleinement explicité, quoique nous pensions, vous et moi, de son irrationnalité.
Ceci dit, ce qui m'a le plus gêné dans le questionnaire, auquel du coup je n'ai toujours répondu, c'est bien que les situations "irrégulières" sont dès l'abord pointées comme telles. Même en admettant que l'Eglise ait totalement raison sur ces points, je trouve que formuler l'enquête en ces termes est très révélateur d'une position qui par définition n'est pas celle du dialogue et de l'écoute. La question n'est pas "quelle proportion de gens en situation irrégulière avez-vous dans votre communauté ?", ou en tout cas ne devrait pas l'être, mais une question ouverte, genre "quelles sont les formes de vie affective et familiale présentes dans votre communauté ?" Et secondairement "que disent les familles - toutes les familles - de votre communauté de la manière dont l'Eglise les considère, ou dont elles pensent que l'Eglise les considère". Là, on met tout de suite le doigt sur "bouh ! pas bien ! enseignement de l'Eglise pas compris (les cruches !) / pas respecté (les faux cathos !) ", voire sur "aaaaah ! familles en souffrance !!!". Le questionnaire ne laisse pas la place à une description neutre ou bienveillante.
Après, effectivement, ce questionnaire a le mérite d'exister, et ce n'est pas rien... Je vais sans doute y répondre quand même avant la date limite, entre deux chocolats de noël !
Une telle bienveillance existerait au sein de l'église ?
RépondreSupprimerA vous lire, il parait si simple de remplir les églises... tout simplement en prenant un peu de hauteur...
un baptisé ayant renié les croyances familiales, dès l'adolescence, devant toute la cécité et les incohérences que vous exprimez si bien.