Oubliant pour un court instant Notre-Dame-des-Landes, la
casse du statut des cheminots et les autres joyeusetés macroniennes, la
cathosphère s’est récemment passionnée pour un sujet moins terre-à-terre :
l’enfer existe-t-il ? Et surtout, le pape a-t-il prétendu le contraire ?
Pour le pape, franchement, je ne sais pas. Je crois que c’est
un homme habile et intelligent, qui maîtrise remarquablement une communication
qui n’est brouillonne qu’en apparence. Et donc, je suis assez convaincu que s’il
a laissé écrire par un journaliste pas franchement catholique, à l’issue d’un
entretien qui était le second du genre, qu’il n’y avait pas d’enfer, c’est
parce qu’il pense qu’il n’y a pas d’enfer. Les démentis du Vatican sont, je
crois, une formalité nécessaire, mais à mon sens, il n’y a là ni raté, ni dérapage :
bien au contraire, il me semble que le pape a pleinement atteint son but.
Mais bon, malgré mon amour du personnage, je ne suis pas là
pour vous parler de François, je suis là pour vous parler de l’enfer – et
surtout pour essayer de vous montrer qu’il n’y en a effectivement pas.
L'enfer selon Giovanni da Modena |
La question de l’existence de l’enfer taraude le
christianisme depuis ses origines. Le problème logique est en effet bien
simple : l’enfer et la damnation, surtout s’ils sont éternels, semblent en
contradiction directe avec l’Amour infini de Dieu. Comment, en effet, un Dieu
infiniment bon pourrait-Il laisser certains de Ses enfants souffrir en enfer
pour l’éternité ? Quel père pourrait se résoudre à cela ?
Ainsi, le théologien du IIIe siècle Origène et
l’école d’Alexandrie affirmaient que, les châtiments ayant pour but de purifier
des péchés, ils ne pouvaient avoir qu’une durée limitée, et que même les
méchants placés en enfer finiraient par bénéficier du salut. Cette doctrine fut
(malheureusement) condamnée par le deuxième Concile de Constantinople en 553.
La croyance en un enfer et une damnation éternels fut ensuite appuyée par
Augustin d’Hippone et Thomas d’Aquin, qui allait jusqu’à affirmer que la
souffrance des damnés en Enfer contribuait à la joie des élus au Paradis.
L’enfer semble en effet nécessaire à beaucoup dans leur soif
de justice, comme rétribution des mauvais comportements sur terre. Ils
n’acceptent pas que ceux qui ont mal agi – que ce soit objectivement ou selon
leurs propres critères – puissent entrer avec eux au Royaume des Cieux. Paolo
Coelho, dans le Manuel du Guerrier de la
Lumière, a une belle page sur ces défenseurs de la morale :
« Une foule de
gens se tient au milieu de la route, barrant le chemin qui mène au Paradis.
Le puritain
demande : “Pourquoi les pécheurs ?”
Et le moraliste
crie : “La prostituée veut faire partie du banquet !”
Le gardien des valeurs
sociales s’exclame : “Comment pardonner à la femme adultère, si elle a
péché ?”
Le pénitent arrache
ses vêtements : “Pourquoi soigner un aveugle qui ne pense qu’à sa
souffrance et ne remercie jamais ?”
L’ascète dit en
s’agitant : “Tu laisses la femme répandre sur tes cheveux une huile
précieuse ! Pourquoi ne pas la vendre et acheter de la nourriture ?”
En souriant, Jésus
tient la porte ouverte. Et les guerriers de la lumière entrent, malgré les cris
d’hystérie. »
En réalité, cette théorie de l’enfer comme punition ou
rétribution des mauvaises actions peut être invalidée très facilement. Dieu
seul étant infini, Lui seul peut agir de manière infinie. Par conséquent, une
créature, quelle qu’elle soit, ne peut commettre qu’une faute finie, limitée.
Le pire criminel de l’Histoire n’a jamais pu et ne pourra jamais qu’infliger
une quantité limitée de souffrance, de douleur, de haine, de mal. Même Satan,
si l’on croit à son existence, n’a pu commettre, n’étant qu’une créature de
Dieu, qu’une quantité finie et limitée de fautes.
Or, rétribuer une faute limitée par une punition illimitée
serait fondamentalement injuste. Conçus comme une punition, l’enfer et la
damnation éternels ne seraient donc pas seulement en contradiction avec l’Amour
de Dieu : ils seraient en contradiction avec Sa justice et feraient de Lui
un Dieu injuste. Sauf à croire en un tel Dieu, on ne peut donc logiquement que
les rejeter.
La bouche de l'enfer - Enluminure médiévale |
Ayant bien saisi le caractère imparable de ce raisonnement,
les défenseurs de l’existence de l’enfer se rabattent sur une autre
explication. Dans ce nouveau schéma, l’enfer ne serait plus un lieu, mais un
état ; et il ne serait plus une punition, mais la séparation de l’âme et
de Dieu. Cette séparation, enfin, ne serait pas imposée par Dieu, mais bien librement
choisie par la créature elle-même, Dieu ne faisant alors que respecter son
choix, son libre-arbitre, en la laissant s’éloigner de Lui si telle était sa
volonté.
C’est ainsi que les réflexions théologiques qu’on trouve ici
ou là sur le sujet sont pleines de réflexions apparemment sages, mais un peu
glaçantes, telles que « Dieu prend au sérieux notre liberté, même si c’est
pour nous perdre », voire « Dieu nous aime assez pour nous laisser
nous damner ». On reste un peu songeur.
Ceux qui croient à l’enfer s’arrêtent évidemment là dans le
raisonnement. Ainsi, ils ont l’impression d’avoir tout sauvé : à la fois
l’idée d’un Dieu d’Amour et le dogme de l’existence de l’enfer, professé depuis
le VIe siècle par l’Église catholique romaine. Et en effet, à ce stade,
on peut leur donner partiellement raison et énoncer cette conséquence logique
des croyances chrétiennes : oui, la créature n’étant jamais contrainte par
Dieu, il serait possible d’imaginer qu’elle fasse le choix radical et définitif
de la séparation d’avec Dieu et se place ainsi dans un état qu’on peut nommer –
pourquoi pas – « enfer ».
Toutefois, s’arrêter là, c’est commettre une erreur de
raisonnement, car on peut, en réalité, aller beaucoup plus loin. Cette vérité
d’étape appelle en effet deux remarques.
La première, c’est que même en voyant les choses ainsi, la
doctrine officielle de l’Église pose encore un problème absolument insoluble. En
effet, elle affirme le caractère définitif, éternel et irrévocable de l’état
dans lequel se trouve l’homme au moment de sa mort, ou l’ange au moment de sa
chute. À propos des hommes, le Catéchisme
affirme (nous soulignons) :
« Mourir en péché
mortel sans s’en être repenti et sans accueillir l’amour miséricordieux de Dieu
signifie demeurer séparer de Lui pour
toujours par notre propre choix libre. Et c’est cet état d’auto-exclusion définitive de la communion avec Dieu et
avec les bienheureux qu’on désigne par le mot “enfer”. […]
L’enseignement de
l’Église affirme l’existence de l’enfer et son
éternité. Les âmes de ceux qui meurent en état de péché mortel descendent
immédiatement après la mort dans les enfers, où elles souffrent les peines de
l’enfer […]. La peine principale de l’enfer consiste dans la séparation
éternelle d’avec Dieu […].[1] »
Et concernant les anges :
« Cette “chute”
consiste dans le choix libre de ces esprits créés, qui ont radicalement et irrévocablement refusé Dieu et Son Règne. […]
C’est le caractère irrévocable du choix des anges, et non un défaut de l’infinie miséricorde divine,
qui fait que leur péché ne peut être pardonné.[2] »
Et, citant Jean Damascène, le Catéchisme ajoute :
« Il n’y a pas de
repentir pour eux après la chute, comme il n’y a pas de repentir pour les
hommes après la mort.[3] »
Or, cela n’est ni logique, ni cohérent. On ne voit pas
quelle nécessité ferait du rejet de Dieu (qu’il vienne des hommes ou des anges)
un choix irrévocable et définitif, quelles qu’en soient les circonstances. De
deux choses l’une : soit c’est la créature qui décide que son choix est
irrévocable, mais comme les créatures n’ont aucun pouvoir de rendre un choix
irrévocable, elle pourrait toujours changer d’avis plus tard ; soit c’est
Dieu qui rend son choix irrévocable, qui interdit de changer d’avis à l’homme
après la mort, ou à l’ange après la chute, mais alors il s’agit bel et bien d’un
défaut dans la miséricorde divine, ce qui est contradictoire avec l’idée d’un
Dieu infiniment bon. Pourquoi un Dieu éternel et infini, surtout s’Il nous
aime, voudrait-Il absolument que nous ayons réussi à L’accepter en 50 ou 80
ans ? Pourquoi diable nous imposerait-Il de faire forcément les bons choix
ici-bas et nous refuserait-Il toute possibilité de rédemption après ?
La conclusion s’impose : même en admettant une
damnation qui soit la séparation, choisie par la créature, d’avec Dieu, cette
séparation ne pourrait en aucun cas être considérée comme irrévocable ou
définitive. Un homme peut donc bien être pardonné après la mort, et un ange
après la chute.
Allez, tu passes à la casserole ! |
L’idée que l’enfer et la damnation existent appelle
cependant une seconde remarque, plus complexe : c’est que la question de
savoir si l’enfer pourrait théoriquement exister n’a en fait que peu d’intérêt.
Oui, théoriquement, on pourrait imaginer un homme qui, même après sa mort,
continuerait à faire éternellement le choix de refuser Dieu. On pourrait aussi
imaginer, tout aussi théoriquement, que Dieu nous aurait créés avec des ailes
de papillon et une grande corne sur le front. Bien sûr, Dieu aurait pu nous créer ainsi ; mais Il ne
l’a pas fait. Et il n’y aurait strictement aucun intérêt à évoquer les infinies
possibilités selon lesquelles Dieu aurait pu nous faire : la seule chose
qui compte, c’est la manière dont nous sommes faits.
Il faut donc se demander si la question de l’existence de
l’enfer ne serait pas du même ordre ; et pour cela, il faut prendre le
problème dans l’autre sens. Plutôt que de nous placer du point de vue d’un
homme ou d’un ange qui refuserait éternellement Dieu, plaçons-nous du point de
vue des bienheureux et – soyons fous – de celui de Dieu.
Est-il possible que qui que ce soit goûte le moindre bonheur
au Paradis s’il sait qu’une seule âme est éternellement damnée ? N’en
déplaise à Thomas d’Aquin, non. Les bienheureux élus du Paradis ne pourraient
qu’éprouver une immense tristesse s’ils savaient qu’un seul de leurs frères
souffrait pour l’éternité la séparation d’avec Dieu. Ou alors, ils ne seraient
ni très bons, ni très aimants. De même pour Dieu : comment pourrait-Il
éprouver le moindre bonheur s’Il savait qu’un seul de Ses enfants était à
jamais séparé de Lui ?
Si l’enfer existe, les damnés connaîtront un malheur
éternel, les élus connaîtront un malheur éternel, Dieu connaîtra un malheur
éternel. En quel Dieu croyons-nous, si nous croyons cela ? Et donc,
l’enfer n’existe pas, la damnation éternelle n’existe pas. Ou plus exactement,
personne n’est en enfer ; mais si l’enfer n’est pas un lieu, mais un état,
dire que personne n’est en enfer, c’est exactement la même chose que de dire
qu’il n’existe pas.
Comment concilier cela avec la liberté des créatures ?
Si personne n’est en enfer, est-ce à dire que nous ne serions pas libres de
refuser Dieu pour l’éternité ? Si, bien sûr. Mais là encore, c’est dans
l’autre sens qu’il faut prendre le problème. Dieu nous laisse libres ;
mais Dieu est au-dessus même du temps. Par conséquent, s’Il ne détermine pas
les choix que nous faisons, Il les connaît tout de même, avant même que nous
les ayons faits. Je suis libre de choisir, mais Dieu, me laissant libre, sait
avant moi ce que je vais choisir.
La damnation éternelle, on l’a vu, ne peut conduire qu’au
malheur de tous ; si donc Dieu, qui connaît nos choix avant que nous les
ayons faits, savait qu’un de Ses enfants allait choisir de Le rejeter
éternellement, Il n’aurait pas créé ; et donc, puisque Dieu a créé, nous
pouvons être certains que c’est parce qu’Il savait qu’aucune de Ses créatures
ne ferait ce choix de le rejeter éternellement.
Est-ce à dire qu’après la mort, le méchant est traité comme
le bon ? On ne peut avancer sur cette question que si on sort de cette
vision binaire des choses ; car il n’y a pas « des bons » et
« des méchants ». Il y a évidemment des gens qui sont meilleurs que
d’autres en ce qu’ils sont plus aimants. Mais même le meilleur des hommes a
commis des fautes, et même le pire des monstres a accompli de bonnes actions[4].
Pour le chrétien, qui croit à la vie après la mort, sous
quelque forme que ce soit, la vie terrestre ne devrait donc pas être vue comme
un tout achevé, mais au contraire comme le début d’un parcours, d’un
cheminement bien plus long. À la fin de sa vie, personne n’est parfait, pas
même le plus grand des saints : il nous reste à tous des choses à
comprendre, à apprendre, à accepter, ne serait-ce que parce que nous avons vécu
dans les conditions particulières et limitées du lieu, du moment, de la culture
au sein desquels nous avons vécu.
Il n’y a donc qu’une seule possibilité logique : si
vraiment nos âmes sont immortelles et si vraiment Dieu nous aime, après la
mort, nous continuons tous notre cheminement en accomplissant ce que nous
n’avons pas réussi à accomplir sur Terre. Que ce cheminement soit plus ou moins
long et pénible selon ce que nous avons fait de notre vie terrestre ne change
rien au fait qu’il concerne forcément tout le monde. Ce qui revient à dire qu’à
notre mort, nous allons tous au Purgatoire, même si ce terme un peu désuet peut
prêter à sourire et devrait peut-être être remplacé[5].
Le Christ n’apporte donc pas la menace d’un châtiment éternel,
mais la bonne nouvelle de l’Amour infini de Dieu, et donc du salut universel et
inconditionnel. Cette bonne nouvelle ne peut apporter que de la joie à ceux qui
la reçoivent. Le christianisme n’est pas une religion de la peur ou de la
soumission. Elle est au contraire une religion de la libération de l’homme et
de son avancée vers l’âge adulte, la maturité de notre espèce, dont nous sommes
encore loin.
On peut comprendre ceux qui redoutent que, sans la peur de
l’enfer, les hommes agissent moins bien ; et bien agir dans la crainte de
la punition est, chez un enfant, un stade certes nécessaire de l’apprentissage
moral. Mais ce n’est qu’une étape, qui doit être dépassée. On n’agit vraiment
bien que quand on le fait par amour du Bien.
Les dogmes de l’enfer, de la damnation et de leur
éternité ne sont en réalité que des scories, au sein du christianisme, des
anciennes manières de penser Dieu, les hommes, le monde et leurs relations. Ils
font partie de ce que, dans ces idéologies préchrétiennes où tout n’était pas à
jeter, loin de là, le Christ a voulu détruire. Les abandonner est une partie
importante de la révolution chrétienne.
[1]
Catéchisme de l’Église catholique,
§1033 à 1035.
[2]
Idem, §392 et 393.
[3]
Jean Damascène, De Fide orthodoxa 2,
4.
[4]
Pour aller plus loin dans cette réflexion et l’appuyer sur un texte
évangélique, on peut se référer à cette homélie sur le Jugement dernier.
[5]
Une magnifique illustration littéraire de cette idée est développée dans le
conte de J. R. R. Tolkien Feuille, de
Niggle, qu’on peut trouver dans les recueils Faërie et Faërie et autres
textes.
Merci Meneldil. 🙂👍Brigitte P.
RépondreSupprimerBonjour Meneldil ,
RépondreSupprimer1)La doctrine de l’enfer éternel, c’est comme la Trinité aucun homme n’aurait jamais osé l’énoncer si ça ne venait pas de Dieu lui-même. C’est donc Jésus lui-même qui nous indique que le châtiment de l’enfer est aussi éternel que la vie au ciel (Matthieu 25.46). Il y a aussi de ce péché contre l’Esprit saint qui ne sera jamais pardonné ni dans ce monde, ni dans l’autre ( Matthieu 12:32, Marc 9:29 et Luc 12:10).
2)Il me semble que votre incompréhension de l’enfer éternel résulte d’une mauvaise compréhension de la liberté. A l’instant même de la mort l’âme prend conscience de ce qu’elle est réellement .Elle rentre ainsi dans une lucidité totale et claire d’elle-même. Ceci entraine qu’à ce moment-là sa liberté s’engage définitivement et irrévocablement dans une décision dans laquelle, elle persévéra toujours et dont elle ne se REPENTIRA JAMAIS.
En effet Ce qui rend notre repenti possible sur cette terre c’est qu’au moment de prendre nos décisions on ne peut saisir en seul instant tous les pours et tous les contres, ainsi notre liberté est obligé d’écarter les contres et considérer les pour sans être totalement sûr . Mais d’un instant à l’autre elle peut revenir sur sa décision et écarter les pours, pour ne considérer que les contre. Mais dans une lucidité totale à l’instant de la mort, il n’y aura plus cet examen successif des pours et des contres, il y aura en instant une vision totale et claire de tous les pours et de tous les contres à la fois. Ainsi plus rien ne pourra venir lui changer d’avis car tout aura été lucidement considérés.
3)Vous comprenez alors que ce qui rend notre salut possible (contrairement à celui des anges) c’est notre pauvreté, notre incapacité à tout saisir, à connaitre l’avenir .C’est ce qui fait d'ailleurs dire à Jésus : « Père, pardonne-leur, car ils ne savent pas ce qu'ils font. ». Vous remarquerez que dans les évangiles en aucun moment Jésus n’a montré la moindre compassion envers le démon au contraire .En effet Dieu n’a pas pitié pour le diable car contrairement aux hommes sur terre Dieu sait que le démon est totalement lucide dans ces actes .A part violer sa liberté ou l'anéantir , Dieu ne peut rien faire il (Lucifer) a choisi cela .
L’existence de l’enfer est la preuve que les bienheureux aiment vraiment Dieu, leur liberté n’a pas été tronquée comme vous le prétendez pour choisir Dieu. Et c’est là que réside leur joie éternelle.
Frédéric,
SupprimerIl y a peu de chances que nous puissions jamais nous mettre d’accord, mais je vais quand même répondre par amour du débat.
1. Sur l’argument évangélique. Je vais sans doute (encore) vous choquer, mais je ne crois pas que même les Évangiles, que je considère pourtant comme les plus sacrés et les plus inspirés de tous les textes, doivent toujours être pris au pied de la lettre, ni qu’absolument tout ce qui y est écrit soit rigoureusement et littéralement exact. Pour moi, l’Évangile n’est pas directement la Parole de Dieu ; c’est une retranscription humaine, et donc forcément imparfaite, de cette Parole.
C’est un très, très large débat, qu’on a peu de chances de trancher ici. Mais je crois que ce n’est pas un hasard si Dieu a fait en sorte qu’il y ait plusieurs versions de l’histoire du Christ, versions parfois contradictoires entre elles (ce qui, je crois, suffit à ruiner l’idée d’une vérité littérale de l’intégralité du texte évangélique). Je crois qu’ainsi, Dieu nous invite à lire l’Évangile avec un recul critique, à le voir justement comme une retranscription humaine, faillible. Ce sont des hommes particuliers, d’une époque particulière, qui ont entendu Jésus, et ils l’ont fait dans le cadre de leur culture, dont ils ne pouvaient pas sortir. Cet argument est donc pour moi irrecevable.
2a. La seconde partie de votre argumentaire mérite qu’on s’y arrête un peu longuement. Vous dites qu’à « l’instant même de la mort l’âme prend conscience de ce qu’elle est réellement ». Je crains de ne pas comprendre. Qu’est-ce que ça veut dire, « ce qu’elle est réellement » ? Arrêtez-moi si je me trompe, mais je crains de voir revenir la distinction binaire entre « les bons » et « les méchants » que je dénonçais. Car, là encore, de deux choses l’une : si c’est par un libre choix que l’âme s’écarte de Dieu, pourquoi ne pourrait-elle pas faire, plus tard, un autre choix ? Et si c’est parce que Dieu l’a faite ainsi, alors c’est Dieu qui est coupable de son péché.
2b. Vous dites qu’au moment de la mort, l’âme a « en instant une vision totale et claire de tous les pours et de tous les contres à la fois ». Cette « lucidité totale » dont vous parlez, je ne crois pas qu’elle puisse advenir au moment de la mort, mais seulement au moment du Jugement dernier, c’est-à-dire au moment où Dieu révèle tout à tous. En effet, l’âme n’est pas un élément parfaitement isolé et coupée du reste du monde, elle est en relation avec lui. Donc, il est impossible qu’elle ait une lucidité totale sur elle-même sans avoir une lucidité totale sur le monde.
Donc de deux choses l’une : soit, au moment de la mort, l’âme a une lucidité totale sur tout, comprend tout, sait tout – mais alors, on voit mal ce qu’il resterait à apprendre ou à révéler au moment du Jugement dernier ; soit l’âme n’a pas cette lucidité totale au moment de la mort. J’opte pour le second choix.
2c. Par ailleurs, vous dites que notre liberté résulte du fait que nous ne pouvons peser en même temps tous les pour et tous les contres. C’est, il me semble, un peu la même chose que vous exprimez quand vous dites que « ce qui rend notre salut possible (contrairement à celui des anges) c’est notre pauvreté », et que le diable, lui, est parfaitement lucide (en d’autres termes, il voit parfaitement tous les pour et tous les contre, et il fait le mauvais choix).
SupprimerCette vision me semble incohérente et difficilement tenable. Dire que le diable est parfaitement lucide en faisant le mauvais choix, c’est dire qu’objectivement, le choix d’accepter Dieu et de Lui obéir n’est pas meilleur que le choix de Le rejeter et de Lui désobéir. En effet, un être parfaitement lucide ne pourrait qu’avoir une claire conscience de ce qui sera meilleur pour lui-même, pour le monde et pour Dieu, et le choisir.
Vous comprenez le raisonnement ? Si le diable est parfaitement lucide ET que le choix de Dieu est objectivement meilleur, alors le diable ne peut faire que ce choix. S’il fait le mauvais choix, il n’y a que trois possibilités logiques : soit il n’est pas lucide et ne voit pas que choisir Dieu serait meilleur même pour lui, le diable ; soit le choix de Dieu n’est pas objectivement meilleur ; soit ce mauvais choix lucide vient d’un défaut qui lui est inhérent, mais comme il a été créé par Dieu, alors c’est Dieu qui est coupable de sa faute. Vous aurez du mal à sortir de ce choix impossible.
La seule conclusion logique, c’est donc que le diable lui-même ne fait pas un choix parfaitement éclairé.
Le même raisonnement doit bien sûr être tenu pour l’âme au moment de la mort : si vraiment l’âme voit tout au moment de la mort, alors elle ne peut logiquement QUE faire le choix de Dieu (et donc l’enfer est vide). Ou alors, c’est qu’elle ne voit pas tout. Ou alors, c’est que voyant tout, elle voit que le choix de Dieu n’est pas objectivement meilleur. Ou alors, c’est que Dieu l’a créée comme ça, et alors c’est de Sa faute. On en revient toujours là.
3. Vous écrivez à propos des bienheureux : « leur liberté n’a pas été tronquée comme vous le prétendez pour choisir Dieu ». J’aimerais bien savoir où j’ai écrit cela. Tout l’objet de mon texte était justement de montrer que l’inexistence de l’enfer ne tronquait en rien la liberté de chacun.
Au plaisir de continuer ça,
M.
Je soutiens l'avis catholique de Frédéric. L'enfer est en fait le paradis de ceux qui choisissent la liberté contre l'amour et l'humilité du Royaume de Dieu.
RépondreSupprimerQuant au fake d'internet qui dit que le pape a nié l'existence de l'enfer, il est absurde : François est presque celui qui en parle le plus. Il est allé jusqu'à en parler à Palerme, face aux Mafiosi de cette ville : "Changez de vie sinon vous irez en enfer".
1) Je vous avoue que votre manière de lire et de considérer les écritures m’a un peu surpris ça m’a rappelé cette parole de Benoit XVI s’adressant aux membres de la Commission théologique internationale : « Le vrai théologien ne cède pas à la tentation de mesurer le mystère de Dieu à sa propre intelligence, en vidant souvent de sens la figure du Christ, mais il est conscient de ses limites comme le furent les grands saints reconnus aussi comme de grands maîtres. » et il rajoute : « …certains pêchent dans les eaux de la Sainte Ecriture avec un filet qui permet seulement une certaine taille de poissons et ce qui dépasse cette taille n'entre pas dans le filet et ne peut donc pas exister. »
RépondreSupprimerLa tradition de l’Eglise est constante non seulement sur l’existence de l’enfer mais aussi son éternité. J’aimerais bien vous citer deux exemples pris au hasard et plus récente reconnus par l’Eglise :
- Les visions des petits bergers de Fatima du paradis, du purgatoire mais aussi de l’enfer. Les voyants de Kibeho au Rwanda auront les mêmes visions.
- Le 2e exemple il s’agit d’un extrait du petit journal de sainte Faustine dont les révélations privé ont été non seulement reconnu par l’Eglise mais surtout ont donné lieu au dimanche de la miséricorde dans la liturgie catholique
« Aujourd’hui, j’ai été introduite par un ange dans les gouffres de l’enfer. C’est un lieu de grands supplices. Et son étendue est terriblement grande. Genres de souffrances que j’ai vues :
La première souffrance qui fait l’enfer : c’est la perte de Dieu
La seconde : les perpétuels remords de conscience.
La troisième : le sort des damnés ne changera jamais.
La quatrième :…. »
Si je vous dis tout cela c’est pour vous dire qu’il y a deux manières d’appréhender les mystères de Dieu
- Ou on les reçoit à genoux en les acceptant et et seulement après on essaie de les comprendre.
- Ou alors on les reçoit debout, en essayant de les comprendre pour les admettre ou pas.
2) Permettez-moi de résumer vos différentes argumentation en quelques mots .Il me semble que vous refusez au fond de croire que l’homme soit vraiment libre devant la grandeur de Dieu. Vous êtes prêt à admettre la liberté de l’homme uniquement dans la mesure où elle ne pourra conduire quelque soit les actes à Dieu c’est dire dans la mesure où elle est tronquée. Vous dites « puisque Dieu a créé, nous pouvons être certains que c’est parce qu’Il savait qu’aucune de Ses créatures ne ferait ce choix de le rejeter éternellement. » Si Dieu ne crée que des hommes qui ne le rejettera jamais pourquoi alors ne pas créer alors les hommes qui ne font que du bien ? Je ne vois même pas la raison définitive du salut si in fine nous devions choisir Dieu. Si on tire les fils jusqu’au bout votre argumentation conduit à la non existence de Dieu.
Au fond vous refusez à la fois d’admettre la liberté de l’homme et l’existence de la mère de tous les péchés : L’orgueil.Il faut avoir le courage d’avoir peur devant l’abime que représente l’enfer.
Bonjour à tous les deux,
SupprimerArnaud, je ne comprends pas du tout cette manière que vous avez d’opposer la liberté à l’amour. Vous écrivez qu’il y aurait un choix à faire entre les deux. C’est à mon avis une énorme incompréhension de ce que veut Dieu pour nous : Il nous veut libres ET aimants.
Frédéric, je suis un peu déçu. Nous avions commencé la discussion sur le plan des arguments et de la raison, et là, vous me servez des arguments d’autorité.
Si je résume, à vous lire, quand on trouve quelque chose de choquant dans l’Écriture, il faudrait faire preuve d’humilité et avaler ça sans se poser trop de questions. Les choses ne sont-elles pas un peu plus complexes ? Je suis d’accord pour dire que nous ne devons pas mettre à la poubelle sans même nous y arrêter les passages de l’Écriture qui nous heurtent, nous dérangent ou nous déplaisent.
Mais entre cette extrémité et celle que vous proposez, il y a quand même un juste milieu à trouver. Je n’aime ni l’attitude qui consiste à tout accepter sans réfléchir, ni celle qui consiste à tordre le texte pour faire croire qu’il dit autre chose que ce qu’il dit et le sauver à tout prix. Il faut admettre qu’il y a dans la Bible des erreurs manifestes, voire des monstruosités, entre les condamnations à mort pour tout et n’importe quoi, l’autorisation de l’esclavage et la supériorité des hommes sur les femmes.
Autre argument d’autorité, après celle de l’Écriture, celle de la « Tradition constante » de l’Église. Mais là encore, quelle valeur cela a-t-il, en soi ? Plus encore que l’Écriture, la Tradition, même constante, de l’Église mérite d’être examinée à l’aune de notre raison.
Restent les « voyants » comme ceux de Fatima. Encore un argument d’autorité plus que discutable. On peut avoir des doutes sur ces visions : même sans les rejeter en bloc, on peut légitimement penser qu’ils n’ont pas eu une vision claire, parfaite, infaillible de tout ce qui leur a été montré.
Tout cela est assez bien récapitulé par votre dilemme sur comment on reçoit les mystères de Dieu. Je crois, pour ma part, que là encore, un équilibre est à trouver : Dieu nous veut parfois à genoux, mais parfois Il nous veut debout. Et s’Il nous a donné la raison, c’est quand même pour qu’on s’en serve.
J’en viens enfin à votre réflexion sur la liberté. Je crois que vous n’avez pas compris ce que j’ai écrit. Si, je crois tout à fait que l’homme est libre, vraiment et entièrement libre. En ce sens, oui, il pourrait faire un choix de refus définitif de Dieu. Seulement voilà, la cohérence de ce que nous savons de Dieu fait que nous pouvons savoir que ce ne sera le cas de personne.
Vous prétendez faire le lien avec le mal que nous faisons tous dans le monde en demandant : « pourquoi alors ne pas créer alors les hommes qui ne font que du bien ? » Mais les deux choses n’ont rien à voir. Dieu peut créer des hommes qui Le rejettent ponctuellement et temporairement (nous le faisons tous) parce qu’Il sait que tous le rejoindront en fin de compte. S’il est temporaire et limité, le mal n’est pas bien grave. Mais si, comme vous le croyez, il est définitif, alors il est un drame de la Création, et pour tout dire une énorme imperfection dans l’œuvre de Dieu.
J’irai plus loin : si Dieu nous crée en sachant que certains finiront en enfer, alors Il est impardonnable. Woody Allen disait : « Si Dieu existe, j’espère qu’il a une bonne excuse ». Dans mon schéma de pensée, Il l’a, cette excuse : c’est que le mal n’est que passager. Dans le vôtre, en revanche, Dieu n’a aucune excuse.
Je ne vois pas du tout en quoi mon raisonnement conduirait à la non existence de Dieu. Vous pouvez l’expliquer ?
Enfin, vous dites qu’il faut avoir le courage d’avoir peur devant l’abîme de l’enfer. Je crois au contraire qu’il faut avoir le courage d’accepter jusqu’au bout toutes les conséquences de l’Amour universel de Dieu.
Bonjour,
RépondreSupprimerCe ne sont pas des arguments d’autorité que je vous ai donné (du moins je ne les vois pas ainsi ) mais des balises .Des balises que l’Eglise et Dieu nous donne pour s’approcher de la Vérité pour ne pas se tromper dans nos réflexions . Si non comment pourrions-nous connaitre la Vérité sur Dieu si lui-même ne nous la révèle pas ? La théologie dont dépend les mystères des fins dernières et la vie de l’au-delà n’est pas la philosophie on ne peut y réfléchir qu’à partir des vérités (dogmes) que Dieu nous donne. Voilà pourquoi j’ai tenu à vous les rappeler. J’aurais préféré une attitude moins dogmatique et plus humble. Au dogme de l’Eternité de l’enfer que l’Eglise et la parole de Dieu proclame vous opposez votre propre dogme :la non existence de l’enfer.
Je vous avoue que je ne comprends pas pourquoi vous dites que : « si Dieu nous crée en sachant que certains finiront en enfer, alors Il est impardonnable. » et qu’il n’a pas d’excuse. Son excuse c’est qu’il nous fit « A peine moindre qu'un dieu »Ps8. L’homme est vraiment libre. En créant Dieu a accepté d’être rejeté car il a fait l’Homme et l’ange libre COMME LUI. Et cette imperfection dont vous parlez est bel et bien la preuve que l’Homme et les anges sont LIBRE COMME Dieu. Dieu a créant à accepter de laisser la place aux autres libertés et même ceux qui ne le veulent pas .Ce n’est donc pas pour moi une imperfection ou une défaite mais une preuve de son humilité infini. Perso si j’aurais été Dieu j’aurais fait comme vous le supposez çàd que je n’aurais laissé exister que des créature semblable à Marie çàd qui in fine me diront Oui .Mais je ne suis pas Dieu.
La vraie question est plutôt comment l’Homme (moi, toi…) ou l’ange en arrive à rejeter Dieu, çàd l’Amour. Comment on en arrive à retourner cette liberté contre Dieu. La réponse c’est l’orgueil.
Que l’homme soit orgueilleux dans le temps c’est un fait, qu’il le fasse dans l’éternité çàd quelques soit les motifs que Dieu lui proposera on ne peut le savoir, seul Dieu peut nous le révéler. Mais par un raisonnement abstrait on peut néanmoins comprendre comment l’âme qui est esprit (la nature des anges) peut s’engage définitivement et irrévocablement dans une décision dans laquelle, elle persévéra toujours et dont elle ne se repentira jamais. Et c’est ce que j’ai tenté de vous expliquer à mon premier message.
Frédéric,
SupprimerUn argument d’autorité, c’est un argument qui ne fait pas appel à notre raison, mais qu’on est censé accepter en vertu de la personne (« l’autorité ») dont il émane. « La Tradition dit ça donc c’est vrai », « Tel voyant dit ça donc c’est vrai », ce sont des exemples parfaits d’arguments d’autorité. Vous ne faites appel à ma raison, vous dites seulement (noir sur blanc, d’ailleurs) que je dois les « accepter » « à genoux » et « avec humilité ».
Or, l’Église a, durant sa longue histoire, posé comme vraies tant d’extraordinaires bêtises, que je ne peux pas, en conscience, me satisfaire de cet argument d’autorité. Ce que disent les voyants et la Tradition, ce sont en effet, comme vous dites, des balises ; et à ce titre, je ne les rejette jamais à la légère. Pour autant, je les examine à la lumière de ma raison, et ne les accepte pas juste en vertu de la personne qui prétend les poser.
Un problème, je pense, est que vous pensez qu’il nous est possible de connaître la vérité. Or, en métaphysique (Kant l’a admirablement montré), la vérité n’est pas objet de connaissance, mais de croyance. Vous vous demandez comment on peut connaître la vérité ? La réponse est simple : on ne peut pas. Je crois que Dieu existe, je crois qu’Il est amour, mais je ne le sais pas. Sinon, tout le monde serait d’accord. Je sais que le carré de l’hypoténuse est égal à la somme des carrés des deux autres côtés ; et là-dessus, d’ailleurs, tout le monde est d’accord.
En ce sens, je ne suis absolument pas d’accord avec la fin de votre premier paragraphe. Vous prétendez qu’au dogme officiel de l’Église, j’en oppose un autre, le mien. Rien n’est plus faux. Un dogme, c’est une croyance présentée comme une vérité incontestable. L’Église proclame en effet le dogme de l’existence de l’enfer et de son éternité. Mais moi, je n’oppose pas un dogme à un autre : j’examine rationnellement le dogme proposé par l’Église, et je conclus que, sauf à renoncer à l’idée d’un Dieu d’Amour, on ne peut que rejeter ce dogme. Vous pouvez essayer de contrer mon argumentation rationnelle par une autre argumentation rationnelle, mais le seul rappel des balises officielles ne va pas suffire. Qu’on se comprenne bien : je ne vous reproche aucunement de me « rappeler » ces balises. Même, je vous en remercie. Seulement, ne me demandez pas de les accepter toutes crues.
Pour votre deuxième paragraphe, pardon mais visiblement, je n’arrive pas à me faire comprendre. Vous me répétez que l’homme est libre, vraiment libre. Je suis d’accord. Et alors ? Ça ne répond pas à mon argument. Je ne dis pas qu’un homme ne pourrait pas choisir de rejeter éternellement Dieu. Je dis qu’aucun homme ne le fera. Vous comprenez la nuance ? Tout le monde pourrait choisir de dire non à Dieu, mais personne ne le fera en fin de compte. Et Dieu le sait, puisqu’Il sait tout, y compris ce qui se passera dans l’avenir.
SupprimerSi une compagnon peut vous aider, et comme je le disais dans le billet, de la même manière, avec Sa liberté, Dieu aurait pu nous créer avec des ailes de papillon. Ou Il pourrait nous condamner tous à l’enfer. On est d’accord sur ces deux points, je suppose ? Puisqu’Il est libre et tout-puissant. Bon. Mais Il ne nous a pas créés avec des ailes de papillon. Et Il ne nous condamnera pas tous à l’enfer.
La seule chose que je dis, c’est que l’idée de l’enfer éternel, c’est exactement pareil : en théorie ce serait possible, à cause de la liberté de l’homme, seulement on peut savoir que ce ne sera le cas pour personne. Du coup, pas la peine de me répéter en boucle que la liberté humaine nous permettrait de rejeter Dieu : là-dessus, je suis d’accord ! Je dis juste que, de fait, personne ne fera ce choix. Et je ne fais pas que le dire, je le démontre (jusqu’à ce qu’on me prouve le contraire).
Vous tentez de dire le contraire en renvoyant, pour les anges du moins, à votre premier message. Mais je n’ai rien à ajouter à la réponse que je vous avais déjà faite : pardon mais non, vous n’avez absolument pas « démontré » en quoi la décision des anges rebelles de rejeter Dieu serait « définitive » et « irrévocable ». Vous l’avez affirmé, mais pas démontré. Relisez mes deux réponses à votre premier message : c’est à cela que vous n’avez pas répondu.
Bonjour,
SupprimerPourtant je vous ai donné une démonstration à mon premier message. Démonstration qui n’est d’ailleurs pas de moi mais que je tiens des cours de théologie et de philosophie de Jean Daujat . Je vous redonne la démonstration que j’avais faite à partir d’une âme mais qui s’applique parfaitement aux anges.
« A l’instant même de la mort l’âme prend conscience de ce qu’elle est réellement .Elle rentre ainsi dans une lucidité totale et claire d’elle-même. Ceci entraine qu’à ce moment-là sa liberté s’engage définitivement et irrévocablement dans une décision dans laquelle, elle persévéra toujours et dont elle ne se REPENTIRA JAMAIS.
En effet Ce qui rend notre repenti possible sur cette terre c’est qu’au moment de prendre nos décisions on ne peut saisir en seul instant tous les pours et tous les contres, ainsi notre liberté est obligé d’écarter les contres et considérer les pour sans être totalement sûr . Mais d’un instant à l’autre elle peut revenir sur sa décision et écarter les pours, pour ne considérer que les contre. Mais dans une lucidité totale à l’instant de la mort, il n’y aura plus cet examen successif des pours et des contres, il y aura en instant une vision totale et claire de tous les pours et de tous les contres à la fois. Ainsi plus rien ne pourra venir lui changer d’avis car tout aura été lucidement considérés. »
Voici en enregistrement audio de l’extrait du cours en question. ça ne dure que 15mn https://gloria.tv/video/rSQHwEC38gwp1yr4xo422uR4U
Bonjour Frédéric,
SupprimerJe suis désolé, mais cette argumentation ne tient pas, et je vous l’avais déjà montré. Je reprends sommairement la démonstration (mais vous aurez plus de détails dans les messages plus haut).
Je pense que nous serons d’accord pour dire que choisir Dieu ou rejeter Dieu ne sont pas deux choix objectivement équivalents. Nous serons d’accord, je pense, pour dire que l’un (choisir Dieu) est objectivement préférable à l’autre (Le rejeter). Et donc, une âme parfaitement éclairée et lucide NE PEUT tout simplement PAS faire le choix de rejeter Dieu, ça n’aurait aucun sens. Pourquoi, en toute lucidité, quelqu’un choisirait-il ce qui est objectivement moins bon, y compris pour lui-même ?
Donc, de deux choses l’une. Soit, au moment de la mort, l’âme humaine est parfaitement lucide et éclairée, et alors elle ne peut que choisir Dieu, et j’ai raison de dire que personne n’ira en enfer. Soit elle n’est pas parfaitement éclairé, et alors son choix ne saurait être irrévocable (et j’ai encore raison).
Je ne vois pas comment vous pourriez sortir de là.
Bonjour ,
SupprimerJ'ai beaucoup réfléchi ces derniers jours sur vos questions et réponses. Alors à la question :
« Pourquoi, en toute lucidité, quelqu’un choisirait-il ce qui est objectivement moins bon, y compris pour lui-même ? »
La réponse se résume en un mot :
«l’ORGUEIL »
L’orgueilleux est celui qui a la ferme conviction de sa propre haute valeur. La lucidité ne rend pas l’âme immaculée après sa vie terrestre. D’où la haute importance de notre vie terrestre .Elle détermine notre destiné. Un orgueilleux dans la lucidité ne devient pas par enchantement humble il PEUT demeurer orgueilleux jusqu’au bout malgré l’évidence. Plus notre degré de connaissance de l’Amour de Dieu est élevé, plus grand sera le risque de s’obstiner dans l’orgueil même dans la lucidité. Ce fut le cas du diable.
C’est ce que la Vierge Marie essaie d’expliquer de manière didactique au jeune adolescent Marcel Van dans les passages que je vous ai envoyé.Substantiellement elle lui dit " Dieu veut faire miséricorde à Lucifer mais Lucifer s’obstine et s’obstinera dans son orgueil « Non serviam » ".
Bonjour Frédéric,
SupprimerPardon, mais je ne trouve pas ça logique du tout. L'orgueil, c'est justement se placer soi-même au-dessus de toute autre chose. Comment l'orgueilleux pourrait-il faire le choix de se faire souffrir lui-même, ou de s'anéantir lui-même ? Ça n'a pas de sens.
Par ailleurs, vous ne faites que déplacer le problème. Dieu est-il objectivement au-dessus de la créature, ou bien n'est-ce qu'une question de point de vue ? Si Dieu est objectivement au-dessus (comme, je pense, vous en conviendrez), alors si on se place soi-même au-dessus de Dieu ou à Son égal, c'est qu'on n'est pas lucide. "Lucide", ça veut dire qu'on voit les choses en vérité, telles qu'elles sont. Par conséquent, non, on ne peut pas continuer à se placer soi-même à l'égal de Dieu si on est lucide.
Je crains que, décidément, vous ne parveniez toujours pas à sortir de cette question-là.
Bonsoir Meneldil,
SupprimerLe démon ne se place pas au dessous de Dieu Saint Thomas d'Aquin dit qu'il est assez intelligent pour vouloir une telle chose ,ce qu'il ne veut pas c'est dépendre de Dieu. Il lui dit :"Ton royaume et mon royaume. "
Et donc encore une fois je pense que vous confondez lucidité et répetence , lucidité et humilité. Si pour vous dans la lucidité on ne peut vouloir que Dieu ça veut dire qu'au fond le péché n'existe pas , personne n'est responsable de son péché puisqu' on ne peut pécher que par ignorance car tout péché n'est que manque de lucidité . La mort de Jésus pour nos péchés et le sacrement de réconciliation sont là preuve que votre raisonnement est erronée.
Il est vrai que la lucidité est la faculté de voir et de comprendre les choses avec clarté et justesse; mais cette faculté n'annihile pas les pechants bon ou mauvais de notre âme . La lucidité est au service de notre humilité ou de notre orgueil autrement dit de notre âme et non l'inverse.
Évidement que les damnés ( les anges déchus) veulent le paradis c'est d'ailleurs l'objet de leur tourment. Mais ce qu'ils ne veulent pas c'est s'humilier ,et se repentir . Autrement dit ils veulent les privilèges du paradis mais pas les devoirs .
Bonjour Frédéric !
RépondreSupprimerJ’ai fini par trouver le temps d’écouter l’émission sur l’enfer, très stimulante. Plusieurs remarques.
Fondamentalement, et même si ce n’est pas la question qui nous occupe, je suis en désaccord avec l’anthropologie ternaire corps-âme-esprit. Pour moi, l’homme est corps et âme, point final. Cette anthropologie ternaire a d’ailleurs été officiellement condamnée par l’Église au IVe Concile de Constantinople, en 869-870.
De même, je ne suis évidemment pas d’accord non plus avec l’idée selon laquelle l’âme ne serait pas immortelle par nature mais par choix. Et là encore – une fois n’est pas coutume ! –, l’Église est d’accord avec moi (le Catéchisme est sans ambiguïté de ce côté-là).
Sinon, pour le sujet qui nous occupe (l’existence de l’enfer et son caractère éternel), je note que Michel Fromaget ne dit jamais rien qui soit foncièrement en désaccord avec le fond de mon propos. Il affirme que l’enfer (ou plutôt la « mort définitive » dont il parle, c’est-à-dire la destruction de l’âme) est le résultat d’un choix, mais d’un choix complètement libre et éclairé. Il affirme même que plus on est déterminé, donc moins on est libre, moins l’acte ou la décision sont déterminants pour savoir si on va vivre éternellement ou mourir.
Or, cela soulève la même question que je vous ai déjà posée, et à laquelle je n’ai pas eu de réponse : comment une âme parfaitement libre et éclairée pourrait-elle choisir de refuser Dieu, que ça mène à sa destruction ou à sa souffrance éternelle en enfer ? Évidemment que tout le monde va choisir de vivre éternellement heureux plutôt que de souffrir éternellement ou de disparaître !
Donc, on en revient toujours là, de deux choses l’une : soit le choix de la personne de rejeter Dieu n’est pas libre, pas éclairé, et dans ce cas sa destruction ou sa damnation éternelle seraient clairement un manquement à l’amour infini de Dieu ; soit ce choix est libre, et alors la personne ne peut que choisir Dieu.
Dans les deux cas, la conclusion est la même : en théorie, des gens pourraient être en enfer ; mais en réalité, on peut être certain que personne n’y est. Donc non seulement ce que dit Michel Fromaget n’est pas en contradiction directe avec ce que j’écris, mais on peut même aller plus loin : sa propre logique devrait le conduire à dire la même chose que moi. Lui et moi nous exprimons dans des termes différents ; moi, j’examine la doctrine officielle de l’Église ; lui, il affirme une autre idée, puisqu’il n’oppose plus la vie éternelle à la damnation éternelle mais à la destruction pure et simple de l’âme. Mais sur le fond de mon billet, une réflexion approfondie de ce qu’il dit lui-même devrait le mener à dire que personne ne mourra, et qu’en fin de compte tout le monde choisira Dieu. C’est la seule conclusion logique de ce qu’il dit lui-même.